Depuis 15 ans, le Festival des traditions du monde a innové de nombreuses manières en offrant aux festivaliers des attractions éblouissantes, jamais vues auparavant. En aménageant un espace extérieur pour en faire un jardin d’inspiration japonaise et chinoise, voisin du chapiteau des Portes de l’Asie, le Festival nous emmène encore plus loin. Le jardin, créé à partir des principes esthétiques de la philosophie zen, favorisera l’arrêt, la méditation et la contemplation, souvent nécessaires au milieu d’une journée endiablée au cœur du festival.
Les jardins zen japonais – ou chán 禪, en Chine – reposent sur une conception particulière de la nature très différente de celle que l’on retrouve en Occident. Dans les traditions issues d’Europe, les concepts de nature et de culture ont longtemps été mis en opposition. Cela transparaît par exemple dans l’aménagement du territoire où la nature, qu’elle soit animale ou végétale, est nécessairement soumise aux volontés et infrastructures humaines. Cette opposition peut même être retracée dans le récit biblique judéo-chrétien des origines dans lequel Adam et Ève sont bannis de la Nature (le jardin d’Éden) suite à l’acquisition de la connaissance. Cette symbolique qui nous a été transmise influence encore notre rapport au monde, mais elle n’est néanmoins pas universellement partagée. Il existe des sociétés où l’idée même de nature est inexistante tant celle-ci n’est pas considérée comme séparée de l’humain, ou d’autres, comme le Japon et la Chine, où nature et culture ne sont pas mises dans une opposition aussi tranchée.
Le Japon et la Chine proposent une vision du monde et des choses qui n’obéit pas aux principes de la philosophie occidentale. Dans leur rapport à la nature, ils insistent sur l’interrelation entre les éléments plutôt que sur l’existence de chaque chose en elle-même. Rien n’existe en dehors de la relation qui lui donne son existence. Dans le contexte d’un jardin, cela signifie l’absence de frontières nettes entre ce qui provient de la nature et ce qui vient de l’humain, ainsi qu’entre le spectateur et le jardin lui-même. Le jardin est plutôt une relation entre différents éléments qui ne prennent leur identité qu’à travers leurs relations mutuelles.
Considérés comme de véritables œuvres d’art, les jardins japonais et chinois appellent différents procédés pour leur conception. On utilise la miniaturisation afin que le jardin évoque, dans son espace restreint, les lacs, rivières et montagnes provenant de paysages différents. L’horizon joue aussi un rôle important, permettant d’incorporer aux jardins des éléments qui n’en font pas partie, comme une colline, des arbres ou un temple au loin. Enfin, le jardin joue sur l’asymétrie afin de créer un dynamisme entre les éléments et, le plus important, entre le spectateur et la composition. Le jardin zen vise véritablement à transformer le regard que l’on porte sur lui.
Finalement, que ce soit pour un bref arrêt ou pour une longue méditation, le jardin zen vous accueillera en dirigeant votre regard et votre esprit vers ses formes qui invitent à la réflexion. Qui aurait cru qu’un endroit aussi apaisant, héritier des philosophies millénaires de l’Asie de l’Est, pouvait se rencontrer au détour d’un spectacle haut en couleur comme ceux que l’on présente au Festival des traditions du monde?