S’il y a un pays incontournable au sein des Portes de l’Asie, c’est bien entendu la Chine. Il faut dire que ce pays fait classe à part pour ce qui est de la densité et la richesse de ses traditions. Contrairement aux autres pays d’Asie, l’institution de fonctionnaires lettrés (mandarins) dont la Chine s’est dotée il y a plus de mille ans a permis une transmission du savoir ininterrompue, ce qui a consolidé l’histoire et la culture d’une façon unique au monde. Encore aujourd’hui, la culture traditionnelle chinoise, les sagesses antiques et les grandes épopées sont bien vivantes et continuent d’être transmises aux nouvelles générations. Parmi ces éléments qui résistent à la mondialisation, l’écriture en est une qui s’est accommodée de l’arrivée du clavardage, des textos et de l’influence de l’anglais.
À mille lieues du système d’écriture alphabétique que nous utilisons en français, la langue chinoise s’écrit avec des caractères appelés hanzi «sinogrammes» dont chacun représente une idée et correspond à une syllabe. Si 26 lettres sont nécessaires pour écrire tous les mots du dictionnaire, en Chine, plus de 50 000 caractères existent. Par chance, pour lire le journal, il ne faut en connaître qu’environ 3 000.
À l’origine, les caractères représentaient des choses bien simples : une rivière, un œil, une montagne, etc. Puis, on les a combinés pour créer de nouveaux sens. Par exemple, le symbole de la femme 女 juxtaposé au symbole de l’enfant 子 a permis de créer le symbole «bon» 好. Chacune de ces combinaisons étant très ancrée dans la culture, le sens peut souvent nous échapper. Le caractère pour famille, qui est composé du symbole «toit» et du symbole «cochon», nous rappelle que dans la Chine traditionnelle, qui était à majorité paysanne, chaque famille possédait un ou plusieurs cochons.
Parfois, lorsque plusieurs mots avaient la même prononciation, on ajoutait un caractère générique appelé «clé» pour le différentier des autres. Par exemple, pour différencier xia (descendre) de xia (crevette), on a ajouté la clé «insecte» devant le caractère «descendre» 下, ce qui a donné 虾.
Aujourd’hui, la Chine fait face à des défis nouveaux avec l’arrivée de choses inconnues auparavant qu’il faut nommer. Ainsi, ordinateur se dit «cerveau électrique» et avion «machine volante». Quant à Internet, c’est tout simplement «filet». Pour ce qui est des marques de commerce, certaines utilisent ce système à leur avantage. Par exemple, Coca-Cola a opté pour une combinaison de caractères au son similaire (ke-kou-ke-le), mais qui, mis ensemble, signifient «délicieux, amusant». Chaque nom propre doit de plus être sinisé, en recherchant le son le plus proche possible avec les caractères déjà existants. Canada se dit «Jia-na-da», Obama «Ao-ba-ma», et Céline Dion «Xi-lin Di-weng».
À l’ère d’Internet et des ordinateurs, on imagine mal un clavier d’ordinateur posséder des milliers de touches différentes. Astucieux, les Chinois ont inventé un système de transcription appelé pinyin qui permet d’écrire avec l’alphabet latin les caractères chinois. En écrivant les lettres «k-e-k-o-u-k-e-l-e» sur le clavier, l’ordinateur écrit automatiquement 可口可乐!
Que ce soit en vous arrêtant devant les souhaits ou les poèmes chinois écrits en caractères chinois à l’intérieur du pavillon des Portes de l’Asie ou en participant aux ateliers d’écriture, vous aurez immanquablement la chance de constater la richesse et la complexité de cette forme d’écriture étonnante qui n’est pas près de disparaître.